« Je prends peut-être ici pour la dernière fois dans cette enceinte… ». Ce sont les paroles suspendues mais terriblement prémonitoires prononcées par Justin CATAYÉE le 20 JUIN 1962 à l’Assemblée nationale. A Cayenne, les forces de l’ordre répriment avec brutalité, férocement un rassemblement pacifique des Guyanais qui projetaient de protester contre l’arrivée de la Légion étrangère sur nos terres. Mais aussi contre l’absence de volonté de l’État d’instaurer un statut spécial en Guyane, comme le réclame le député Justin CATAYÉE. Cette répression se solde par de nombreuses arrestations et des dizaines de blessés dans les rangs desquels se trouvent des adolescents, des femmes et même des personnes âgées.
Informé de la gravité de la situation, de la répression sanglante de son peuple, CATAYÉE prend la parole. Mais Jacques CHABAN-DELMAS, président de l’Assemblée nationale l’interrompt. Le Guyanais n’a même pas le temps d’achever sa phrase qu’on lui coupe le micro. Comme il l’avait prédit, sa voix ne résonnera plus jamais au Palais Bourbon.
Préférant être auprès de son peuple réprimé, Justine CATAYÉE décide de rentrer en Guyane. A l’époque, Air France assure une liaison Paris-Cayenne en vingt-deux heures par un Boeing 707 avec escale à Pointe-à-Pitre et un changement d’avion pour rejoindre Cayenne. Ce 22 JUIN 1962, l’avion transportant Justin CATAYÉE et 102 autres passagers s’écrase contre la colline – la Caféière à 4h30
du matin par un temps orageux.
Cette voix brisée en plein vol n’a jamais été oubliée des Guyanais. Je me souviens de la grande tristesse qui a marqué les obsèques de Justin CATAYÉE. Le local du Parti socialiste guyanais a été transformé en chapelle ardente et un lieu de recueillement pour permettre à des milliers de camarades, sympathisants et même adversaires politiques de lui rendre un dernier hommage.
22 JUIN 2020. Cinquante-huit ans après, je constate que les idées de Justin CATAYÉE trouvent toujours un écho favorable auprès de la population. CATAYÉE, l’homme passionné, épris de liberté, humaniste, est rentré dans le Panthéon de l’histoire de la Guyane.
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